mercredi 30 décembre 2015

Activités en Italie



Du 10 au 13 décembre2015 à Latina (Italie), j’ai été invité à participer à une série d’événements liés à la présentation du projet d’un documentaire ayant pour titre «Da Est a Ovest» et dont le sujet est l’ancien camp de réfugiés de Latina.
En effet, de 1957 à 1990, ce camp a accueilli des dizaines de milliers de réfugiés qui, pour la plupart, arrivaient des pays communistes d’Europe. L’existence de ce camp a été très longtemps occultée en Italie.

L’événement principal s’est tenu le vendredi 11 décembre à la faculté d’Economie de l’Université Sapienza qui a été installée dans les murs mêmes de l’ancien camp. Ce jour là, la faculté d’Economie fêtait ses 25 ans d’existence.
La télévision (RAI), la radio locale de Latina, ainsi que des journalistes de La Repubblica (le grand quotidien italien de centre gauche) et de la presse locale avaient été invités.
En présence d’environ 180 personnes plusieurs témoignages ont pu être entendus: Ceux de citoyens de Latina ayant été en contact avec les réfugiés (employeurs, fonctionnaires, anciens policiers) ainsi que ceux de 2 anciens « locataires » du camp : celui d’Aurelia Klimkiewicz, canadienne, ex polonaise et le mien, ancien Bucarestois.
Des documents, des films, des photos ont été présentés et des extraits de livres consacrés au camp de Latina ont été lus, dont quelques passages traduits en italien, de mon livre « Une Vie, Un Dossier ».
J’ai répondu au mieux à toutes les questions des médias présents (au moins 6 ou 7 interviews) dans un italien, hésitant au début, puis de plus en plus assuré !

La comparaison avec la situation actuelle n’a pas manqué. Le journaliste (de gauche) Emilio Druidi du « Il Messaggero » a dit que tous les réfugiés passés par Latina ne représentaient que 0,1% des réfugiés d’aujourd’hui dans le monde.
En mettant en parallèle l’ensemble les réfugiés économiques, climatiques, politiques ainsi que de différentes périodes historiques, avec la minorité passée à Latina, il essayait de minimiser l’histoire de ce camp.
La fuite du communisme était une action individuelle ; nous ne venions pas par millions. De plus, la majorité d’entre nous venions d’Europe (dont tout le monde a plein la bouche; l’Europe). Les migrants actuels viennent d’autres continents.
Malgré le temps qui passe, l’histoire des gens fuyant le communisme continue de déranger.

Voir sur l’événement:
https://www.facebook.com/photo.php?fbid=10206577234887367&set=pcb.10206577267288177&type=3)

Une autre conférence s’est déroulée le lendemain, samedi 12 décembre, au lycée technique Ettore Majorana de Latina en présence d’environ 200 élèves et professeurs.

Ces manifestations ont eu un grand succès. Il s’est avéré que les habitants de Latina ne connaissaient pas l’existence de ce camp et que c’est encore une surprise aujourd’hui.

Dans les années ’50, en Italie, le Parti Communiste représentait au niveau national environ 35% des votes. Dans la région de Lazio il en avait beaucoup plus. Il n’était certainement pas souhaitable de parler de ces gens qui fuyaient le « paradis communiste ». Selon la propagande communiste jusqu’en 1980, ces fuyards étaient des délinquants, de dangereux gangsters. 

Les abords du camp devaient être évités par les jeunes filles particulièrement de nuit. Les logements au voisinage du camp avaient perdu un tiers de leur valeur.

 

Dans toutes mes prises de paroles, j’ai évoqué l’inscription actuelle du mur à l’entrée du camp qui rend hommage aux réfugiés hongrois. Cette plaque aurait été installée à l’occasion du jumelage de la ville de Latina avec la ville de Pécs (Hongrie).

Une proposition a été faite à la mairie pour qu’elle en pose une nouvelle qui inclue tous les autres réfugiés d’origine si diverses.

Je pense que la mairie s’empressera de ne rien faire.

 

Le matin du 11 décembre, la journaliste à l’origine du projet de documentaire, Emanuela Gasbarroni, a organisé une rencontre (filmée) entre 3 personnalités communistes (un ancien sénateur et deux apparatchiks locaux, âgés d’environ 75 – 78 ans) et les anciens « locataires » Aurelia Klimkiewicz et moi.

Cela a été très intéressant car si le communisme est mort, certains communistes sont toujours vivants.

Ils ont commencé par des discours convenus et des généralités sur l’horreur du capitalisme et la nécessité de lutter contre, etc. etc.

A un moment donné j’ai entendu que les communistes italiens ont abattu le fascisme et le nazisme au cours de la 2ème guerre mondiale. Je suis intervenu en leur disant que moi, pauvre idiot, je croyais que cela a été fait par les Alliés et principalement en Italie, par l’armée américaine. Ils ont noyé le poisson.

L’ancien sénateur s’est déclaré communiste à vie et nous a dit qu’il n’avait jamais rien fait de mal, qu’il avait essayé de défendre les ouvriers, etc.

Là, je suis de nouveau intervenu, et bien soutenu par Aurelia Klimkiewicz, je lui ai dit que je pensais volontiers qu’il était sincère, mais, qu’il avait été quand même complice de tous les crimes du communisme. Le PCI avait participé à tous les congrès des partis « frères », avait toujours envoyé des télégrammes de félicitations à tous les leaders communistes à l’occasion de leur fêtes et surtout qu’il s’était bouché les oreilles pendant 40 ans pour ne pas entendre des multiples témoignages d’au delà du rideau de fer.

Il n’est pas sûr que ce passage soit conservé au montage !

Mais, je l’ai dit !

L’ambiance était tendue mais est resté civilisée.

Nous nous sommes quitté d’accord sur nos désaccords.

 

14 décembre 2015